La pratique vocale à l’hôpital, un instrument de libération du corps

Passerelles
vendredi13janvier 2017

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La musicienne intervenante Fabienne Berthet mène depuis début 2016 des ateliers réguliers de pratique vocale auprès de patients du service soins et réadaptation de l’Hôpital Ste Marguerite, en partenariat avec l’Assistance Publique des hôpitaux de Marseille. Elle revient ici sur cette expérience de pratique artistique en milieu hospitalier. Une dynamique qui sera maintenue pendant toute l’année 2017.

Ces rencontres, riches et intenses, ont permis l'expression manifeste des ressources, de la vitalité dont l'être humain dispose, dans un contexte délicat d'hospitalisation et à un âge avancé. Dès les tous premiers instants, qui correspondent à l'arrivée dans la salle, à la prise de contact, aux derniers échanges avant de se quitter, le changement d'attitude des patients est frappant et s'observe tant sur le plan physique, que sur le plan de l'éveil, de l'ouverture aux autres et à soi-même. De tout ce que requiert la participation à un atelier vocal, mobiliser et valoriser ce qui est valide, sans que les patients ne se déprécient ou s'évaluent, apparaît plus que jamais fondamental.  L'énergie est suffisante pour porter le souffle donc pour porter la voix.

Le corps doit pouvoir s'organiser autour de la respiration. La posture devrait conditionner une bonne émission : dans un fauteuil, le corps endolori... au premier abord cela semble difficile. Mais imaginons les chanteurs lyriques actuels desquels les mises en scène attendent des prouesses physiques. C'est un peu la même chose.

Les artistes de cet atelier vont effectuer de véritables prouesses : leur conquête va consister à libérer le plus possible leur corps, à le rendre le plus à l'écoute des mouvements respiratoires. Minimalistes, les corps s'explorent, se détendent, gagnent en  confiance. Les capacités d'attention des patients et leur application sont impressionnantes.

Pendant l'atelier, le mélange et l'équilibre qui s'installent entre l'humilité, la simplicité, mais aussi le franc « être » de ces personnalités, est une jouissance à vivre et partager avec eux. L'intensité égale celle d'un travail de répétition en vue d'une performance. Les jeux vocaux sont appréciés et les gestes, hésitants ou chaotiques, sont sources de plaisir, de curiosité, de surprise et d'amusement. Et finalement, la voix fonctionne.

Les chants font surgir les souvenirs, suscitent un intérêt culturel, car nous évoquons les contextes des œuvres (compositeur, livret, portée de l’œuvre, liens avec d'autres arts), un intérêt littéraire, historique, linguistique, etc. pour lesquels les compétences de chacun sont véritablement accueillies. Nous écoutons les œuvres du répertoire ou les enregistrements réalisés pendant l'atelier avec émotion. Les voix sont là, belles, et l'interprétation chargée de sens.

Tout ceci est possible grâce au personnel hospitalier et aux familles, qui permettent à l'atelier de se dérouler dans le confort et la sérénité. Leurs sourires, leurs regards curieux ou enjoués, leur participation sont autant d'encouragements et de reconnaissance envers nos grands aînés.

par Fabienne Berthet, musicienne intervenante