CHANTIER EDUCATIF JEUNES AUX ATELIERS DE VENELLES

Passerelles
vendredi6décembre 2013

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La salle de réunion à l’étage des ateliers de fabrication de décors et costumes est un endroit particulièrement important. S’y réunissent régulièrement les équipes techniques, parfois avec les équipes artistiques des productions, pour y ajuster intentions créatives et savoir-faire. Lundi 14 octobre, cette salle était fonctionnelle ; depuis le 19 octobre, elle est résolument accueillante, agréable et vivante. Tout cela grâce à Hanane, Abdeljabar, Mohamed et Karim qui ont poussé la porte des ateliers techniques de Venelles pour y mener une semaine de travail, lors d’un Chantier Educatif Jeunes visant à embellir cet espace. Suivez-les dans leur semaine d’apprentissage, au contact des équipes du Festival d’Aix!

Après un premier temps d’observation des lieux, les quatre jeunes passent rapidement à l’action, avec une vitalité qui sera maintenue tout au long des travaux. Ils sont accompagnés par une équipe d’éducateurs de l’Addap 13, à l’initiative de cette action. C’est au printemps dernier que Nadia Safer, éducatrice de rue, propose au service socio-artistique, avec lequel elle travaille depuis plusieurs années, de monter un projet de chantier en lien avec les activités du Festival : « Ce type d’action se situe en amont des dispositifs d’insertion. C’est une mise au travail réelle d’un groupe de jeunes, avec des objectifs éducatifs, et qui visait à ce que les jeunes s’adaptent à un cadre de travail, découvrent une diversité de métiers autour de l’opéra et de la dynamique du Festival ». Une première réunion aux ateliers de Venelles permet alors de préciser les bases et les intentions de l’action : « Le but était pour nous de faire intervenir les jeunes pour qu’ils s’approprient un projet de qualité, qui ait du sens pour eux et qui les valorisent, en aucun cas de leur faire faire de la peinture pour faire de la peinture », précise Emmanuel Champeau, régisseur général du Festival. Le choix d’un chantier dans cet espace pouvait représenter un intérêt pour tous : un besoin pour le Festival, une cohérence avec les objectifs de l’Addap 13 et, pour les jeunes, l’occasion de faire l’expérience d’un travail collectif, à l’image de ceux mis en place au sein du Festival.

La conception et la réalisation du chantier suivent les habitudes de travail aux ateliers. Une fois le projet défini, Alice Deneux, technicienne CAO DAO du bureau d’études du Festival, crée le concept et conçoit les plans en juin, les soumet à la chef costumière – principale utilisatrice du lieu au moment du Festival, puis les présente à l’équipe de l’Addap dès la rentrée, à l’occasion d’un dernier temps de travail préparatoire : « Ce type de travail correspond bien à ma formation initiale en architecture d’intérieur. Ce n’est pas par la suite exactement le métier que j’ai exercé, préférant faire un lien avec le spectacle vivant, comme ici au Festival. Mais ce projet était spécifique. Après une discussion avec Emmanuel et Véronique, chef costumière, sur l’usage de ces salles, j’ai fait plusieurs propositions, en reprenant les couleurs du Festival ».

Les éducateurs constituent alors une équipe de jeunes, venus de différents quartiers d’Aix-en-Provence et motivés par la proposition. Emmanuel Champeau établit le planning du chantier, avant de passer le relais au régisseur Rachid Sidi-Youssef, qui installe tout le matériel nécessaire de manière à ce que les jeunes puissent réaliser leur mission dans les meilleures conditions et dans les délais impartis. C’est lui qui accompagne le déroulement du chantier et qui encadre les jeunes durant leur semaine de travail : « C’était important que l’aventure soit intéressante pour eux, et que nous ayons nous aussi du plaisir à être avec eux – à entendre les retours de l’équipe des ateliers, ça a été le cas. Pour moi, cette expérience a été enrichissante car je ne suis pas habitué à mener ce type d’action dans un cadre professionnel. Je le fais personnellement par le biais du sport, mais la question du travail est bien plus délicate, elle comporte un enjeu primordial pour des jeunes en difficulté ou en question dans le domaine professionnel. J’ai pu aussi échanger avec eux sur mon parcours, et leur expliquer que je n’ai pas tout de suite commencé par un travail permanent au Festival. » Messages reçus par Abdeljabar : « Ça apprend à grandir, c’est un genre de stage qui nous montre comment ça se passe, et qui nous pousse à être plus autonomes. C’est Rachid qui m’a dit “apprends à être autonome !” ».

Dès le premier jour du chantier, Alice expose les plans à cette nouvelle équipe, Emmanuel et Rachid leur présentent le planning et les tâches à se répartir. Les jeunes n’en sont pas à leur première expérience de travail : Karim s’investit dans un commerce familial et d’autres jobs saisonniers, et Abdeljabar a accompagné son père dans le secteur du bâtiment. Hanane, quant à elle, s’est orientée vers le secteur de l’administration et était curieuse de prendre part à un chantier technique : « C’est une belle expérience, et cela m’a appris à peindre ! ». Mohamed a suivi le Parcours Professions Opéra pour une découverte des métiers du spectacle vivant; les lieux ne lui étaient donc pas totalement inconnus, mais l’enjeu était pour lui d’en faire partie pendant une semaine : « J’aime bien cette expérience. Et on n’a pas eu trop de pression ». Chacun est en construction de son parcours, de ses choix, et les éducateurs, présents eux aussi dans le chantier, les accompagnent dans ces préoccupations.

Le but d’un Chantier Educatif Jeunes n’est pas de former à un métier, mais bien de s’engager dans une réalisation collective avec un cadre, des horaires, des étapes, et de s’ouvrir à un nouvel univers, parfois éloigné des réalités des jeunes. A entendre les plaisanteries fuser et sentir l’ambiance impulsée par leur présence, la proximité s’est rapidement réalisée. « Ce que j’ai apprécié, c’est de faire vraiment équipe », relève Nadia, « la réussite de ce projet est d’avoir senti d’emblée l’unité se constituer entre nous, dans un but commun de mener à bien la rénovation de la salle ». Et les éducateurs Mehdi, Magali, Murielle et Nadia sont bel et bien en bleus de travail, pinceaux à la main, avec les jeunes et Rachid.

Le chantier rondement mené s’est conclu par un barbecue avec tout le personnel des ateliers de Venelles, dans la douceur du mois d’octobre. « On est là pour un travail ensemble, et parfois ça aboutit à d’autres échanges, nous avons eu des discussions sur les rapports humains, sur la mixité au sein d’une équipe, sur la façon de parler dans un cadre de travail », rajoute Rachid, rejoignant la conclusion de Karim : « C’est un travail, et on a rencontré de belles personnes ».

Embellie, la salle de réunion garde aussi la trace d’une rencontre. Au hasard des itinéraires, ces liens se retrouvent dans la ville : « c’est très sympa d’avoir recroisé Karim au Jas de Bouffan, tout sourire avec ses amis qu’il m’a présentés », conclut Emmanuel. « Il faut à présent faire un bilan avec l’équipe d’éducateurs, pour envisager la suite ».