QUI EST ANDREA BRETH ?
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Andrea Breth est l’une des artistes les plus incontournables de la scène germanophone. En quarante ans de carrière, elle s’est imposée dans ce milieu très masculin grâce à son approche radicale et psychologique des textes, sa direction d’acteurs et son sens de la composition visuelle de l’espace, qui font ressembler certaines de ses scènes à des tableaux vivants. Retour sur le parcours singulier d’une véritable pionnière.
DES DÉBUTS PROMETTEURS (1952-1983) —
Née en 1952 en Bavière, Andrea Breth grandit à Darmstadt et poursuit des études de littérature allemande avant de tout arrêter pour se consacrer au théâtre. Elle réalise ses premières mises en scène dès 1975 à Brême, Wiesbaden et Hambourg où elle s’attaque à des auteurs majeurs de la fin du XIXe siècle (Schnitzler, Strindberg) et de la première moitié du XXe siècle (Brecht). Ses spectacles rencontrent un succès prometteur et elle est invitée en 1981 à faire ses débuts à la Freie Volksbühne de Berlin avec Emilia Galotti, un drame bourgeois allemand de la fin du XVIIIe siècle. Elle n’a pas encore trente ans et la voilà propulsée sous les feux des projecteurs de la capitale pour sa première incursion dans le répertoire classique. Ce spectacle est un échec qui anéantit presque sa carrière naissante. Empêtrée dans un projet trop ambitieux, elle ne résiste pas à la pression et la surexposition rendues d’autant plus difficiles à vivre qu’elle est la seule femme à évoluer dans ce monde entièrement masculin. Elle décide d’arrêter la mise en scène et part à Zürich encadrer des étudiants en théâtre.
CONSÉCRATION D’UNE ÉTOILE MONTANTE DE LA MISE EN SCÈNE (1983-1992) —
L’appel de la scène est plus fort et Andrea Breth fait un retour fracassant à Fribourg en 1983 avec sa mise en scène de La Maison de Bernarda Alba, dernier drame du poète andalou Federico García Lorca. Cette pièce lui permet d’être la première femme à être invitée au très prisé Theatertreffen de Berlin (événement qui réunit les dix mises en scène germanophones les plus remarquables de la saison sélectionnées par un jury) et d’être consacrée « Metteur en scène de l’année » par le journal Theater Heute. Andrea Breth est désormais l’une des étoiles montantes de la jeune génération des metteurs en scène nés après-guerre et reçoit le tout premier prix Fritz Kortner en 1987. Les scènes de Berlin et Vienne s’offrent désormais à elle.
UNE FEMME À LA TÊTE DE LA SCHAUBÜHNE DE BERLIN (1992-1997) —
En 1992, Andrea Breth devient la directrice artistique de la Schaubühne et succède aux metteurs en scène Peter Stein et Luc Bondy. Elle devient ainsi la première femme à diriger l’un des principaux théâtres de Berlin. Elle y présente notamment des auteurs russes qu’elle affectionne, comme Anton Tchekhov dont elle met en scène Oncle Vania et La Mouette.
BURGTHEATER DE VIENNE ET DÉBUTS À L’OPÉRA (DEPUIS 1997) —
Andrea Breth quitte l’Allemagne et devient entre 1999 et 2006 artiste en résidence du prestigieux Burgtheater de Vienne, équivalent autrichien de la Comédie-Française. Plusieurs de ses spectacles sont présentés au Theatertreffen, dont sa nouvelle mise en scène d’Emilia Galotti en 2004, plus de vingt ans après son échec berlinois. L’année 2000 marque ses débuts à l’opéra avec Orfeo ed Eurydice de Gluck à Leipzig, suivi de La Fiancée vendue de Smetana, Carmen et de son triomphe au Festival de Salzbourg avec Eugène Oneguine en 2007. Comme au théâtre, ses spectacles à l’opéra sont radicaux et extrêmement incarnés. Son approche et certaines scènes de son Wozzeck (Berlin 2011) et de sa Traviata (Bruxelles, 2012) choquent et divisent, mais elle renoue avec les faveurs du public et de la presse en 2014 avec le succès unanime de son Jakob Lenz de Wolfgang Rihm, compositeur dont elle met également en scène l’opéra Das Gehege trois ans plus tard.
Portrait rédigé par Louis Geisler, dramaturge
Extrait du dossier pédagogique sur Jakob Lenz