Leah Hausman : The flying body coach

Académie
jeudi16juin 2016

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Tout a commencé en 2011. La chorégraphe et metteuse en scène britannique Leah Hausman avait été invitée à mettre en espace La Clémence de Titus de Mozart au Festival d’Aix. On lui propose alors de diriger un workshop sur le mouvement dans le cadre de la résidence Mozart de l’Académie. C’est un succès immédiat. Depuis 2013, elle y participe chaque année. 

Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots en quoi consiste votre intervention ?

On m’a dit un jour : « You are the flying body coach »! C’est un peu ça. Si je vois un chanteur qui est mal à l’aise avec son corps, j’essaie de trouver un moyen rapide pour qu’il se sente mieux dans sa façon de bouger ou de jouer. Lors des sessions de travail avec l’Académie, il faut tout d’abord que le corps soit échauffé, ouvert et détendu, comme un enfant qui s’apprête à jouer. Je rappelle aux artistes comment fonctionne le corps, comment est construit notre squelette et surtout la colonne vertébrale, car quand on est sur scène, on a tendance à oublier d’être naturel. Je leur fais littéralement porter un masque pour qu’ils se rappellent que ce n’est pas seulement avec la tête qu’ils font de la musique, mais aussi avec leur corps.

Depuis deux semaines, vous êtes professeur dans deux résidences, celle de Mélodie & création et celle de musique de chambre...

Je n’aime pas parler de moi-même comme d’un professeur… Ce n’est pas tout à fait ça ! Je me vois plutôt comme une sorte de guide. Je suis à leurs côtés. Comme avec ce chanteur qui n’arrivait pas à sautiller. Je lui ai pris la main, nous avons sautillé ensemble et ça a marché tout de suite ! J’essaie de leur donner un maximum d’énergie.

Quel est le « défaut » que vous remarquez le plus souvent chez ces artistes ?

Les chanteurs ont la fâcheuse habitude de faire des gestes qui n’ont rien à voir avec ce qu’ils sont en train de dire ! C’est inconscient. D’autres se balancent de gauche à droite ou garde la tête fixée vers la salle alors même que leur corps tourne. Et ça, peu importe leur niveau ! Il s’agit donc de leur rappeler comment le corps bouge naturellement. Ce travail du corps ouvre l’esprit et leur permet d’être dans l’instant présent, d’arrêter de se préoccuper des notes qu’ils vont devoir jouer dans trois pages. Il faut utiliser cette énergie de l’instant !

Vous avez aussi rejoint l’équipe de Kalîla wa Dimna

Dans Kalîla, la chanteuse Ranine Chaar avait très souvent tendance à lever les mains vers le haut quand elle chantait. Elle ne s’en rendait absolument pas compte. Je lui ai donné un bâton et lui ai demandé de le tenir avec ses deux mains lorsqu’elle chantait. Et là il y a eu un déclic… Tout a changé ensuite.

Le langage du corps est un langage propre à chaque culture, comment travaillez-vous avec ces artistes venus des quatre coins du monde ?

Si on fait des généralités, le langage du corps des Français est très petit et très précis. Les Américains font des gestes beaucoup plus grands ; quant aux Allemands, ce n’est ni grand, ni petit, mais c’est plus direct. Il s’agit donc à chaque fois de s’adapter à l’artiste qui est en face de nous. Dans tous les cas, j’essaie de respecter et d’aimer ce qu’ils sont. Je cherche le corps de chaque personne. Parfois, je tente un exercice, et si ça ne marche pas, je l’accepte. Cela veut dire que l’artiste EST comme ça. Je ne veux pas les faire devenir ce qu’ils ne sont pas mais plutôt de leur faire découvrir où sont leurs forces.

La chorégraphe Leah Hausman ouvrira l’une de ses master classes au public le 5 juillet, dans le cadre de la résidence Mozart. Rendez-vous à l’Hôtel Maynier d’Oppède à 12h. 
Propos recueillis par Saskia de Ville le 15 juin 2016.