Hommage À Trisha Brown

Nous avons appris avec infiniment de tristesse le décès de Trisha Brown. Le Festival d’Aix avait accueilli cette immense artiste à plusieurs reprises : sa mise en scène et chorégraphie de L’Orfeo de Monteverdi avait fait sensation en 1998 et, après une tournée triomphale en Europe et en Amérique, avait été reprise en 2007. Trisha était revenue à Aix en 2010 avec une soirée Rameau, qui incluait Pygmalion et des extraits de Hippolyte et Aricie.

Après avoir révolutionné la danse par ses performances new-yorkaises dès les années 1960, elle développe un langage très personnel où l’abstraction va de pair avec une infinie poésie. À l’opéra, elle aborde les œuvres de Monteverdi, Sciarrino (Luci mie traditrici et Da gelo a gelo) et Rameau avec une élégance et une sensibilité hors du commun. Le vol de la danseuse interprétant le rôle de Musica dans le prologue de L’Orfeo reste un moment d’anthologie. J’ai été ébloui par sa création sur Winterreise de Schubert, chanté et dansé par Simon Keenlyside avec quatre danseurs et danseuses de sa compagnie.

La collaboration avec cette immense artiste est l’une des plus belles et des plus intenses qu’il m’ait été donné de vivre. Je garde un souvenir précis de chacune de nos rencontres et séances de travail à Bruxelles, New York ou Aix. Trisha était une artiste d’une grande douceur et d’une exigence extrême. Je me souviens avec une vive émotion du solo improvisé qu’elle nous a offert à Bruxelles fin juin 2007, lors de ma soirée d’adieu à La Monnaie. C’est, je pense, la dernière fois qu’elle a dansé en public.

Son art et sa poésie nous accompagnent sur notre chemin.

Bernard Foccroulle