HOMMAGE À JORGE LAVELLI (1932-2023)

Au festival
vendredi13octobre 2023

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Le Festival d’Aix-en-Provence a appris avec regret la disparition de Jorge Lavelli ce 9 octobre 2023. Né en 1932 à Buenos-Aires, arrivé à Paris dans les années 1960 où il fonde le Théâtre de la Colline en 1977 quelques années après avoir été naturalisé français, le metteur en scène d’origine argentine a été l’un des plus importants de son temps, et par ailleurs un grand compagnon de route du Festival. Dans les années 1970 et 1980, il signe ainsi la mise en scène de six opéras dans la cour du Théâtre de l’ancien Archevêché, participant à faire du Festival d’Aix un lieu important de la mise en scène lyrique, servie par une réflexion dramaturgique poussée.

L’année 1975 est celle des grandes révélations lyriques de son travail : Idomeneo à l’Opéra d’Angers, son Faust révolutionnaire à l’Opéra de Paris, et Le Carnaval de Venise d’André Campra au Festival d’Aix. Bernard Lefort, qui vient de prendre la direction du Festival en 1974, souhaite en élargir le répertoire et en renouveler l’image : avec cette œuvre dont Lavelli fait une lecture pleine de fougue, le public d’Aix redécouvre la musique baroque sous un jour nouveau.

La collaboration entre Lefort et Lavelli au Festival est riche : comme Patrice Chéreau ou encore Peter Brook, Lavelli fait partie de ces artistes ayant apporté à l’opéra un regard neuf sur les œuvres du répertoire, tantôt par une approche historique critique – une Violetta chantée par Sylvia Sass, broyée par la société bourgeoise du XIXe siècle (La Traviata, 1976), ou une Susanna noire incarnée par Barbara Hendricks opprimée par ses maîtres bourgeois au début du XXe (Les Noces de Figaro, 1979) , tantôt par une lecture poétique de la musique et des univers baroques – comme pour Le Carnaval de Venise ou pour Alcina (1978). Teresa Berganza (Ruggiero) et Christiane Eda-Pierre (Alcina) y partagent l’affiche dans une scénographie noire, empreinte de l’atmosphère d’un Moyen-Âge rêvé, qui envoûte le Festival. Lors de l’ouverture de sa première saison de l’Opéra de Paris en tant que directeur, Bernard Lefort lui confie en 1980 la mise en scène de Dardanus de Rameau, dans la lignée de cette confiance nouée au Festival d’Aix.

L’aventure de Jorge Lavelli au Festival se poursuit sous la direction de Louis Erlo, continuant d’explorer l’œuvre de Mozart. Une Flûte enchantée en 1989 et un Enlèvement au Sérail en 1990 viennent ainsi compléter la riche liste de ses collaborations, très souvent menées de pair avec son ami décorateur et costumier Max Bigens (l’immense table de banquet de La Traviata, les grandes baies de verre et de métal des Noces, les temples égyptiens mouvants de La Flûte enchantée). Ces spectacles aux scénographies magiques ou monumentales ont contribué à construire l’identité scénique du Festival d’Aix et à renouveler les approches de l’opéra en laissant la place à des visions singulières et réflexives sur les œuvres du répertoire, tout en plongeant le public dans des imaginaires modernes.

 

À REGARDER

Un reportage sur la première d’Alcina en 1979 au Festival d’Aix

À LIRE

Une interview de Christiane Eda-Pierre donnée en 2015 pour le Festival d’Aix

Die Zauberflöte de Mozart, Festival d’Aix-en-Provence 1989 © Ville d'Aix

Die Zauberflöte de Mozart, Festival d’Aix-en-Provence 1989 © Ville d'Aix